Je suis intervenue au nom du MoDem en commission des Lois, sur la proposition de loi visant à mieux lutter contre la fraude à l’identité dans le cadre des mineurs non accompagnés.
Ce texte propose de remplacer la présomption de minorité qui prévaut dans notre droit positif par une présomption de majorité lorsque l’intéressé refuse de se soumettre à un examen médical d’évaluation de son âge, un test osseux qui est très critiqué car peu fiable (marge d’erreur de 18 mois entre 16 et 18 ans).
Avec mes collègues du groupe démocrate nous n’y sommes pas favorables car il tend à créer un régime d’exception défavorable à l’intérêt supérieur de l’enfant et comporte notamment un risque d’inconstitutionnalité.
L’inversion de la présomption de minorité que prévoit ce texte semble contraire à la Constitution. En effet, dans sa décision du 21 mars 2019, le Conseil constitutionnel a expliqué que « font partie des garanties attachées à la protection de l’enfance, l’impossibilité de déduire la majorité d’une personne de son seul refus de se soumettre à un examen osseux ». Par conséquent, la présomption de majorité reviendrait à inverser la présomption du fait du refus de l’examen médical, ce qui est contraire à l’intérêt supérieur de l’enfant qui impose que les mineurs présents sur le territoire national bénéficient de la protection légale attachée à leur âge.
De plus, un certain nombre de juridictions internationales posent le principe d’une présomption de minorité. Cette présomption de minorité est également consacrée par la Cour européenne des droits de l’homme et le Comité des droits de l’enfant des Nations unies consacre de manière claire cette présomption de minorité dans ses décisions du 31 mai 2019 contre l’Espagne.
Enfin, derrière le dispositif de cette proposition de loi se pose la question des modalités de détermination de la minorité des mineurs non accompagnés.
Le recours, notamment à des examens radiologiques osseux aux fins de détermination de l’âge, en l’absence de documents d’identité valables (prévu à l’alinéa 2 de l’article 388 du code civil) ne fait pas l’objet d’un consensus ni la création d’un fichier biométrique dénommé « Appui à l’évaluation de la minorité » (AEM).
Avec mes collègues du Groupe Mouvement Démocrate et Démocrates apparentés nous y sommes donc défavorables.